◁ Retour au concert du ven. 11 oct. 2024
Programme détaillé
Voyager 130
Création française
[12 min]
The Raven
[Le Corbeau], pour narrateur et orchestre
D’après la nouvelle homonyme d’Edgar Allan Poe
Création européenne
Le Dormeur – Les Cloches – Romance – Le Colisée – Le Corbeau
[28 min]
--- Entracte ---
Concerto pour violon et orchestre op. 14
I. Allegro moderato
II. Andante
III. Presto in moto perpetuo
[24 min]
Porgy and Bess : A Symphonic Picture
Arrangement de Robert Russell Bennett
[24 min]
Distribution
Orchestre national de Lyon
Leonard Slatkin direction
Lambert Wilson récitant
Jennifer Gilbert violon
Introduction
À l’occasion de son 80e anniversaire, Leonard Slatkin, directeur musical honoraire de l’Orchestre national de Lyon, retrouve son ancienne phalange avec la triple casquette de chef d’orchestre, de compositeur et d’heureux père d’un fils tout aussi doué pour la musique que lui-même. Pour la première fois en Europe, nous entendons The Raven [Le Corbeau], une pièce de 1971 où l’orchestre accompagne, souligne, colore chaque mot du poème homonyme d’Edgar Allan Poe. Compositeur prolifique pour l’écran, Daniel Slatkin sait lui aussi que la musique est une formidable narratrice ; Voyager 130 (2022) évoque les sondes du programme d’exploration interstellaire de la Nasa pour nous guider dans le cosmos. L’Amérique s’offre dans toute sa pluralité, entre lyrisme, blues, negro-spiritual et jazz quand George Gershwin s’enfonce dans la réalité de la communauté afro-américaine des années trente pour composer son opéra Porgy and Bess (1934). Robert Russell Bennett (1894-1981) en réalisera ce medley orchestral en 1942 à la demande du chef d’orchestre hongrois Fritz Reiner, alors directeur de l’Orchestre symphonique de Pittsburgh. Le sang américain coule également dans les veines de Jennifer Gilbert, violon solo supersoliste de l’ONL ; elle est la soliste du magnifique Concerto pour violon de Samuel Barber (1939), première commande reçue par le jeune compositeur.
(Texte : Auditorium-Orchestre national de Lyon)
Daviel Slatkin, Voyager 130
Composition : 2024.
Création mondiale : Dublin, National Concert Hall, par le National Symphony Orchestra of Ireland dirigé par Leonard Slatkin.
Création française.
Lorsque je suis entre deux projets de film ou de télévision, ma femme Bridget m’encourage souvent à écrire des pièces pour le concert. Cela stimule mon imagination et me conduit dans des directions que je n’aurais peut-être jamais explorées dans un média visuel. Au cours de l’été 2022, j’ai relevé le défi. Lorsque je cherche l’inspiration, je me tourne souvent vers Beethoven et, alors que j’écoutais ses quatuors à cordes, le Treizième (opus 130) m’a particulièrement parlé. En approfondissant mes recherches sur cette œuvre, j’ai découvert qu’un enregistrement du cinquième mouvement figurait sur le Golden Record, un disque contenant les «sons de la Terre», à bord des deux vaisseaux spatiaux Voyager. Ça a immédiatement tilté dans mon esprit et j’ai décidé d’écrire une pièce qui raconte l’histoire du voyage de Voyager dans l’espace, la «Cavatina» du Treizième Quatuor fournissant le matériau thématique.
On commence sur la rampe de lancement, avec les sons des systèmes informatiques de calcul créés par un synthétiseur électronique, la puissance de la fusée caractérisée par le grondement des cordes graves et des cuivres, des sons mécaniques de métal et de bois, un motif original et un hautbois solitaire en staccato, figurant le système de communication à bord de Voyager lui-même. L’attente monte, ces systèmes devenant de plus en plus bruyants, jusqu’à ce que la fusée s’élance enfin, libérant une explosion d’énergie et d’élan. C’est vers la fin de cette section énergique que l’on trouve la première référence à la «Cavatina» – un fragment joué comme une fanfare par les cors et les altos.
Les fuselages de la fusée se détachent de Voyager, désormais en orbite. Alors qu’on admire la beauté de la terre vue d’en haut, résonne la première page de la «Cavatina», jouée sous sa forme originale de quatuor à cordes. Elle est accompagnée de sons de synthétiseurs et d’un enregistrement figurant sur le Golden Record ; on y entend toutes sortes de salutations prononcées dans des dizaines de langues, révélant la précieuse cargaison que Voyager transporte – notre identité.
La «Cavatina» et le motif original sont présentés dans de nouvelles métamorphoses, toutes plus grandioses les unes que les autres, traduisant les images indescriptibles de ce voyage. Le vaisseau spatial passe devant Jupiter, Saturne et Neptune. Soudain, Voyager atteint les limites de notre système solaire.
Il ne traverse plus la beauté de l’univers, mais un vide glacial. Le sentiment vertigineux d’être confronté à cette immensité est exprimé par le retour des salutations du disque d’or, ainsi que par des sons de la nature. Ceux-ci sont déformés et étirés dans le temps, accompagnés de cordes glacées et frissonnantes, et d’un sombre duo entre les cors et cors anglais.
La musique s’intensifie jusqu’à un point culminant triomphal, d’où émerge la paix, les quatre solistes des cordes jouant un canon contenant de nouveaux fragments de la «Cavatina».
Les sons s’estompent, à l’exception des harmoniques éthérées des cordes aiguës, des effets de synthétiseur et du hautbois solo représentant Voyager. Alors que ces sons s’éloignent lentement, nous restons en compagnie de Voyager qui, entièrement seul, s’enfonce de plus en plus profondément dans l’inconnu.
– Daniel Slatkin
Traduction Auditorium-Orchestre national de Lyon
Leonard Slatkin, The Raven
Composition : 1971.
Création : mai 1971 au Powell Hall par Vincent Price, l’Orchestre symphonique de Saint-Louis sous la direction du compositeur, dans le cadre du Saint Louis Symphony Orchestra Sunday Festival of Music.
Création européenne.
«Nevermore» (jamais plus), voilà ce que répète inlassablement le corbeau à un être affligé par la perte de sa Lenore bien-aimée. Rien de plus, telle une condamnation à l’attente sans fin ni espérance. En dix-huit strophes de six vers, le poème d’Edgar Allan Poe soumet la beauté du verbe aux images les plus effrayantes de la littérature fantastique. Sa forme rigoureuse use des rimes comme des rythmes, et ses figures de répétition sont terriblement obsédantes. Pour raconter une telle histoire, il faut un narrateur familier des récits d’épouvante. Sa partition achevée, Leonard Slatkin s’en est donc remis à la voix de Vincent Price, avec d’autant plus de joie que c’est pour le célèbre acteur qu’il avait jeté son dévolu sur le poème de Poe.
1968 : deux ans après ses débuts de chef à la tête du New York Youth Symphony, ayant aussi étudié la direction avec Walter Susskind à Aspen, Leonard Slatkin est nommé chef assistant à Saint-Louis, sur les bords du Mississipi, dans l’État du Missouri – bien loin de sa ville natale de Los Angeles et de la Juilliard Scholl de New York. En 1970, le musicien de 25 ans découvre que l’acteur Vincent Price est né à Saint-Louis. Vincent Price n’est pas n’importe qui, immortalisé par deux étoiles sur le Hollywood Walk of Fame, pour ses prestations cinématographiques et télévisuelles. À l’écran, il a connu et incarné la peur, que ce soit dans L’Homme au masque de cire ou dans La Mouche noire, La Nuit de tous les mystères, L’Abominable Docteur Phibes ou La Chute de la maison Usher, liste non exhaustive fortement inspirée par Poe. Avec Roger Corman, il a aussi fait face au Corbeau. S’il n’a plus désormais le physique troublant du jeune dandy, il a gardé sa voix, belle et inquiétante à la fois, celle qu’on entendra encore douze ans plus tard dans la chanson Thriller de Michael Jackson. C’est pour cette voix que Leonard Slatkin, fasciné par l’entêtante structure poétique de Poe, a décidé d’écrire un ouvrage qui se situerait entre le mélodrame et le concerto pour voix parlée.
Ayant commencé à écrire de la musique en réalisant divers arrangements pour les festivals qui ponctuaient sa scolarité au lycée, Leonard Slatkin a pensé devenir compositeur avant de se destiner à la direction d’orchestre. Inscrit à l’Université d’Indiana, il y a toutefois été rebuté par un enseignement qu’il considérait trop académique. Devenu chef, il a alors disposé avec l’orchestre d’un formidable instrument, et c’est pour ses musiciens qu’il s’est remis à la composition. Un sujet comme Le Corbeau de Poe était une incitation à toutes sortes d’expérimentations sonores. L’atmosphère lugubre et l’étrangeté du moment réclamaient des timbres étranges et inconnus. Tutti effroyable puis douze coups de cloche. Un joli contrepoint de bois est affreusement ponctué de notes répétées de clarinette, comme pour rappeler l’heure à travers les croassements du méchant volatile. Il y a dans cette instrumentation quelque chose qui relève de la bribe ou de la ruine jusqu’à ce crescendo terrifiant concluant la première partie. Mais c’est naturellement la voix qui joue ici le rôle de soliste, omniprésente, accompagnée par les instruments quand elle n’est pas simplement bruitée par percussions.
En cinq parties enchaînées, la partition suit pas à pas le texte. Dans la deuxième, parfois, la folie gagne le narrateur. Minuit encore, mais les cloches ne s’arrêtent plus, enveloppent la voix dans leurs textures subtiles de harpes, de piano et de percussions faisant la part belle aux métallophones plus ou moins résonants. Le temps se détraque, entraîne la voix dans une spirale de motifs qui refusent de s’arrêter. Point de lyrisme. Les cordes demeurent telles des ombres en arrière-plan. Même la romance n’est plus qu’un souvenir, ponctuée de brefs soli rappelant la disparue. Ponctué de fanfares, «Le Colisée» devient une longue lamentation de glissandos sinistres, et la dernière partie, malgré de trop brefs mélismes de flûtes oiseaux et des échos de mélodies de cordes, se distingue surtout par ses timbales qui ne cessent de répéter «Nevermore».
Publié en 1845, le poème de Poe a été plusieurs fois mis en musique, notamment sous forme de poème symphonique par Joseph Holbrooke à l’aube du XXe siècle. Selon le musicologue et chef d’orchestre Leon Botstein, «le sentiment d’affinité entre les écrits de Poe et la musique réside peut-être dans les qualités amorphes, abstraites, mais psychologiquement puissantes des illustrations dramatiques de Poe, qui paraissent ressembler aux qualités de la musique elle-même». En ne cherchant pas à faire disparaître le texte dans la musique, en ne cherchant pas même à l’illustrer, Leonard Slatkin confère aux mots une terrible puissance. Ce n’est pas dans le texte mais dans l’esprit du personnage que l’orchestre s’enfonce avec l’auditeur. Pour promouvoir la création de son ouvrage à Saint-Louis, une affiche avait été conçue montrant Leonard Slatkin posant avec un corbeau au zoo de la ville. Si la photographie était en noir et blanc en souvenir des vieux films de genre, la musique déploie toute sa palette de couleurs pour révéler les pâleurs et les noirceurs de l’âme du narrateur.
– François-Gildas Tual
Barber, Concerto pour violon
Composition : 1939-1940.
Révision : 1948.
Création : Philadelphie, Académie de musique, 7 février 1941, par Albert Spalding (violon) et l’Orchestre de Philadelphie sous la direction d’Eugene Ormandy (version originale) – Boston, Symphony Hall, 6 janvier 1949, par Ruth Posselt (violon) et l’Orchestre symphonique de Boston sous la direction de Serge Koussevitzky (version révisée).
Marquée par la Grande Dépression et les tensions internationales croissantes, après l’euphorie des Années folles, la décennie 1930 vit éclore une floraison éblouissante de concertos pour violon : Stravinsky (1931), Schönberg, Szymanowski et Martinů (1933), Milhaud (1934), Berg et Prokofiev (1935), Glazounov (1936), Bartók et Bloch (1938), Britten, Hartmann, Hindemith, Barber et Walton (1939), pour ne citer que quelques noms.
Le Concerto pour violon est la première commande reçue par le jeune Samuel Barber : Samuel Fels, un magnat de l’industrie du savon, le destine à son protégé, le violoniste d’origine russe Iso Briselli. La composition débute au cours de l’été 1939, dans la quiétude de Sils-Maria, un petit village des Alpes suisses ; mais l’invasion de la Pologne et la menace de la déclaration de guerre conduisent les États-Unis à rappeler leurs ressortissants en catastrophe. Dans une panique angoissante, les places manquant sur les paquebots devant l’afflux de candidats à la traversée, Barber réussit tout de même à rentrer chez lui.
Mi-octobre, deux mouvements sont prêts ; Briselli semble les apprécier, mais il renonce finalement à jouer le concerto, pour des raisons qui restent obscures. Malgré ce revers, Barber termine la partition. Ayant entendu dire que le virtuose Albert Spalding cherche un concerto américain à inscrire à son répertoire, il lui présente le sien, avec succès : Spalding en assure la création le 7 février 1941.
Le succès public est considérable, même si des voix plus critiques s’élèvent dans la presse. Le lyrisme généreux de l’œuvre, particulièrement dans le premier mouvement, le diatonisme délibéré du langage harmonique, la simplicité d’une écriture au charme et à la poésie parfois presque mozartiennes ont conquis le cœur de nombreux auditeurs, tout en attirant sur le compositeur quelques accusations d’académisme. Une écoute attentive révèle toutefois de nombreuses subtilités tonales et modales, et par endroits une véhémence (développement du premier mouvement), une mélancolie (Adagio), une âpreté (le mouvement perpétuel final) que le radieux thème initial laisse difficilement présager – cicatrices vraisemblables des circonstances de la composition.
Mécontent de ce qu’il décrivait comme «un point culminant insatisfaisant dans l’Adagio et une orchestration parfois confuse dans le finale», Barber révisa le concerto en 1948, supprimant quelques passages et modifiant la partie de violon solo (notamment dans le finale), allégeant l’orchestration en plusieurs endroits et réécrivant les vingt dernières mesures du mouvement lent, qui s’achève désormais dans une poignante désolation.
– Claire Delamarche
Gershwin, Porgy and Bess : A Symphonic Picture
Arrangement de Robert Russell Bennett (1894-1981) : 1942.
Création : Pittsburgh, 1943, par l’Orchestre symphonique de Pittsburgh placé sous la direction de Fritz Reiner.
Ordre des emprunts à l’opéra (d’après Robert Russell Bennett) :
– Scène dans Catfish Row (avec les appels des colporteurs, de la marchande de fraises et du vendeur de crabes)
– Début de l’acte III «Clara, Clara» (Requiem)
– Début de l’acte I (Introduction)
– «Summertime»
– «I Got Plenty o’ Nuttin»
– Musique de tempête (Hurricane)
– «Bess, You Is My Woman Now»
– La Fête de pique-nique
– «There’s A Boat That’s Leavin’ Soon For New York»
– «It Ain’t Necessarily So»
– Finale («Oh, Lawd, I’m On My Way»)
Pur produit de la vie musicale américaine, George Gershwin n’a jamais poussé les portes d’un conservatoire. Enfant, il préfère les joies de la rue et du patin à roulettes aux leçons et devoirs scolaires, découvre la musique grâce à un piano mécanique et un ensemble de jazz à Harlem, se sensibilise à la musique classique grâce à un camarade violoniste répétant un morceau d’Antonín Dvořák. Gershwin se construit ainsi à son propre rythme. Les trottoirs sont son clavier tout comme le piano familial. Certes, il reçoit quelques enseignements de qualité, celui de Charles Hambitzer qui le fait travailler ses gammes et l’entraîne dans les salles de concert. Mais du point de vue du caractère, Gershwin se fait seul, gagnant ses premiers dollars avec son instrument avant de conquérir les théâtres de Broadway et l’Amérique tout entière.
On a longtemps hésité sur la nature de Porgy and Bess. Opéra et comédie musicale, fallait-il choisir ? Gershwin lui-même s’est expliqué : «Si en faisant cela, j’ai créé une nouvelle forme d’expression lyrique qui mélange l’opéra classique et le théâtre moderne, elle découle naturellement de la nature qui a été travaillée… J’ai tenté ici de développer un aspect de la culture américaine qui permettrait de séduire beaucoup de monde au lieu de ne plaire qu’à quelques happy few. […]. Si je réussis, cela tiendra en même temps de Carmen, tout à la fois drame et idylle, et pour la beauté, des Maîtres chanteurs.»
Créé en septembre 1935 au Colonial Theatre de Boston, Porgy and Bess s’inspire d’une nouvelle d’Edwin Dubose Heyward, elle-même écrite d’après une histoire vraie que Dubose Heyward et son épouse avaient adaptée dès 1927 au théâtre. À l’origine, c’est donc l’histoire d’un noir infirme qui tente d’échapper à la police après avoir attaqué une femme. Désormais sous le nom de Porgy, l’homme a pris les traits d’un être à la fois bon et naïf, confronté au mal, destiné à devenir à son tour un meurtrier alors qu’il n’a jamais cessé d’espérer. Catfish Row (l’Allée du poisson-chat), c’est la misérable gargote où les pêcheurs et cueilleurs de coton se retrouvent au terme de leurs dures journées de labeur dans un petit port de Caroline du Sud. On y joue aux dés, on y danse et on s’y bat parfois, dans l’excitation de l’alcool et de la drogue, dans la lassitude et la fatigue du travail. Catfish Row, c’est aussi le titre que le secrétaire d’Ira Gershwin, frère et parolier de George, a donné à la première suite symphonique réalisée dès 1935 par le compositeur. Plus ou moins oubliée, cette partition a été progressivement remplacée par une autre de Robert Russell Bennett, moins suite que medley.
Dans ce «tableau», des extraits plus ou moins brefs sont collés sans chercher à respecter la chronologie du drame, mais parfois transposés pour assurer une cohérence générale. Si des gestes orchestraux rappellent l’origine théâtrale des morceaux, le plus important demeure le traitement des durées ; en effet, l’arrangement a été réalisé pour le chef Fritz Reiner, qui souhaitait l’enregistrer avec son orchestre. Le tout ne devait pas dépasser vingt-quatre minutes afin de tenir sur trois disques 78 tours, soit six faces de quatre minutes chacune. Et c’est le chef lui-même qui a décidé de la répartition et de l’équilibre des extraits.
Extraite du deuxième acte, la célèbre chanson de Sportin’ Life ironisant sur la Bible («It Ain’t Necessarily So» («Ce n’est pas nécessairement le cas»]) se glisse entre des extraits du troisième acte. Le proxénète y rappelle comment un berger a renversé un géant tout en précisant que «ce n’est pas nécessairement le cas». Voudrait-on expliquer l’ordre des scènes retenues que l’on se dirait que cette chanson pourrait servir de morale à ce résumé symphonique de l’ouvrage. Bien sûr, Reiner a opté pour quelques morceaux parmi les préférés du public, devenus pour certains d’entre eux de véritables standards. On retrouve le thème de «Summertime» comme l’émouvante déploration ouvrant le troisième acte, requiem offert par le chœur à la défunte Clara, la femme du pêcheur. L’ouragan, page symphonique particulièrement remarquable du deuxième acte, resurgit naturellement comme dans la précédente suite de Gershwin. Et ce pot-pourri se clôt, tel l’opéra, sur l’image de Porgy repartant seul sur ses béquilles en chantant «Oh, Seigneur, je suis sur mon chemin».
– F.-G. T.