Science et Musique

Sa. 16 janv. 2021

Programme détaillé

Joseph Haydn «Chaos» de «La Création» [5 min]
Joseph Haydn 2e mouvement (Andante) de la Symphonie n° 101, «L’ Horloge» [8 min]
Gustav Mahler/Benjamin Britten What the Wild Flowers Tell Me [10 min]

Guillaume Connesson (né en 1970)

Supernova
I. Quelques Cercles
II. Pulsating Star
[16 min]

Orchestre national de Lyon
Christian Reif 
direction

Introduction

Haydn, «Chaos» de «La Création»

Haydn, Andante de la Symphonie n° 101, «L’ Horloge»

Mahler/Britten, What the Wild Flowers Tell Me

Composition : Mahler, Troisième Symphonie : 1895-1896.
Arrangement pour orchestre réduit par Britten : 1941.

Ce morceau symphonique est une adaptation par le compositeur britannique Benjamin Britten du deuxième mouvement de la Troisième Symphonie de Gustav Mahler, réalisée en 1941 sur la suggestion de son éditeur Erwin Stein. À l’époque, les symphonies de Mahler n’étaient pas autant jouées qu’elles le sont aujourd’hui, et l’arrangement de Britten était une tentative pour attirer l’attention d’un large public sur ce compositeur pour lequel il avait une affinité particulière. L’arrangement conserve l’essence de l’original de Mahler, mais dans une version pratique pour un orchestre symphonique de taille standard. L’extrait choisi, d’une écriture déliée et d’un grand raffinement, proche de la musique de chambre, ne nécessite pas constamment les déploiements instrumentaux des autres mouvements de la symphonie (l’orchestre original comporte 4 flûtes, 4 hautbois, 5 clarinettes, 4 bassons, 8 cors, 4 trompettes, 4 trombones, 1 tuba, 2 harpes, cordes, timbales et une abondante percussion) et se prête donc particulièrement bien à cette adaptation. Britten a sans doute souhaité également prendre le contrepied des idées reçues sur Mahler, compositeur de symphonies titanesques aux déferlements sonores fracassants.

Avec sa Troisième Symphonie en six mouvements, la plus longue qu’il ait composée, Mahler avait comme ambition de renfermer dans une œuvre monumentale tous les éléments de la Création : depuis le monde minéral inanimé, les plantes, les animaux, l’homme, jusqu’à la sphère céleste irradiée par la transcendance divine. Le second mouvement portait à l’origine le sous-titre «Ce que me disent les fleurs dans la prairie», transposé par Britten en «Ce que les fleurs sauvages me disent». C’est un intermezzo, dans un mouvement de menuet, délicat et élégant, où passe par moments un souffle de vent vif et frisquet, «la chose la plus insouciante que j’ai écrite» disait Mahler.

Isabelle Rouard

Connesson, Supernova

Composition : 1997.
Création : Montpellier, 17 octobre 1997, par l’Orchestre philharmonique de Montpellier, sous la direction de Friedmann Layer.*
Dédicace : à René Bosc et René Koering.

Deux sources m’ont inspiré cette œuvre d’orchestre : d’une part une toile de Kandinsky intitulée Quelques Cercles (1926), dans laquelle une prolifération de ronds de couleurs se déploie sur un fond bleuté et uniforme de nature cosmique, d’autre part la lecture du livre Une brève histoire du temps de l’astrophysicien anglais Stephen Hawking qui m’a donné envie de trouver des résonances musicales aux mondes fascinants de l’infiniment grand. L’amalgame intérieur que je fis entre cette toile et ce livre – l’une donnant peut-être à voir l’autre – m’invitait à recréer à l’orchestre ces sensations d’espace et d’énergie qui m’avaient tant impressionné dans l’un et l’autre de mes deux modèles. Un des phénomènes naturels qui a le plus excité mon imagination est le récit tragique et merveilleux de la mort d’une étoile. Celle-ci, après avoir consommé tout son carburant, explose et produit une clarté (une supernova) égale à cent millions de soleils. Des milliards de particules sont alors expulsées dans l’espace avec une très grande énergie. Les deux mouvements enchaînés qui composent ma partition retrouvent, dans l’attraction du langage musical, des lignes d’énergie comparables, je l’espère, à ce scénario cosmique.

Le premier mouvement est justement un crescendo de tension, une mise en ébullition progressive, de nature mélodique. Les phrases sinueuses et chromatiques planent, comme en apesanteur, dans l’aigu de l’orchestre. Après le troisième élan lyrique, les basses font leur entrée et participent au crescendo général. La matière musicale semble entrer en fusion quand une déflagration «libératrice» ouvre sur une transition où l’orchestre est secoué de spasmes entrecoupés par un mystérieux choral de cuivres.

Commence alors le deuxième mouvement, «Pulsating Star», une danse des particules de matière où le rythme et les courts motifs incisifs prédominent. Le contraste entre les deux mouvements se retrouve dans la couleur de l’orchestration, liquide et tournoyante dans «Quelques Cercles», solide et tranchante dans «Pulsating Star». Parvenue à son apogée, la danse connaît une accalmie où les motifs reviennent sous forme de souvenirs et d’ombres lointaines. La coda débute par la réapparition du choral de cuivres – qui avait déjà marqué la fin du premier mouvement – mais cette fois il submerge tout l’orchestre. Il sera lui-même balayé par un vent cosmique, sifflant et rageur, dont la violence met un point final à l’œuvre. J’ai placé en exergue de ma partition une citation de Kandinsky : «Le cercle que j’utilise tellement ces derniers temps ne peut parfois pas être qualifié autrement que de cercle romantique. Or le romantisme futur est effectivement profond, beau, il a du fond et, comble de bonheur, c’est un morceau de glace dans lequel brûle une flamme

Guillaume Connesson