Si écouter La Mer est toujours un pur bonheur, ce sont deux autres partitions de ce programme, plus rares, qui retiendront notre attention. Seule page instrumentale de Boieldieu à s’être imposée au répertoire, le Concerto pour harpe (1800) déploie les qualités que l’on apprécie dans La Dame blanche ou Le Calife de Bagdad : le charme mêlé d’une grâce encore mozartienne et d’accents déjà romantiques, et une écriture volubile et mélodieuse qui ne dédaigne pas les démonstrations virtuoses. Pour l’interpréter, l’Orchestre national de Lyon accueille le harpiste le plus en vue du moment, Xavier de Maistre. Premier français admis au sein de l’illustre Orchestre philharmonique de Vienne, ce magicien montre une palette de timbres et de caractères, une précision des attaques, une intelligence de la polyphonie peu communes, sortant la harpe de sa connotation angélique sans sacrifier nullement sa suavité exquise. Fin connaisseur du répertoire français, dont il a arpenté les recoins les plus secrets au long d’une carrière ancrée au Royaume-Uni, Yan Pascal Tortelier est le complice idéal. Familier du trio de Ravel, qu’il a souvent joué dans sa jeunesse de violoniste avec son père Paul et sa soeur Maria de la Pau, il s’est taillé de nombreux triomphes comme chef d’orchestre – des BBC Proms à Prague, San Francisco, Tokyo ou Melbourne – avec la magnifique orchestration qu’il en a réalisée en 1992. Les rythmes basques du « Modéré », les facéties du « Pantoum », la gravité de la « Passacaille » y prennent un relief insoupçonné ; la dimension symphonique ainsi conférée au chef-d’oeuvre ravélien culmine dans les fanfares grandioses concluant le « Final ».

Yan Pascal Tortelier dédicacera ses disques à l’entracte et Xavier De Maistre à l’issue du concert.

Ce concert est enregistré par Mezzo pour une diffusion ultérieure.